[ HRP ] Bon, alors je souhaite une bonne lecture pour ceux qui auront le courage de tout lire ! C'est la première fois que j'écris un BG et je dois dire un des trèèèèès rare texte que j'ai rédigé dans toute ma petite vie n.n. La qualité ne sera pas forcement au rendez-vous, contrairement aux incohérences, mais après tout, on débute tous un jour ! [/HRP]
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I. Illusions.
Laissant une dernière fois mes doigts glisser sur les touches du piano, je lâche un éclat de rire, écho parfait à celui de l'homme accoudé à côté de moi. Me caressant de son regard tendre, il se penche au dessus de l'instrument en chêne, pour venir sceller nos lèvres d'un baiser langoureux avant de murmurer quelques mots à mon oreilles, me faisant pouffer de plus belle.
Déesse, ce que je pouvais aimer cet homme … Cela faisait seulement quelques mois que je le connaissais et deux semaines que nous étions en couple, mais je pensais avoir trouvé en lui le conjoint parfait.
Il fait le tour pour venir se glisser derrière moi. Posant ses mains sur mes hanches, il me redresse avec douceur avant de me guider vers le salon. Autour de nous, les meubles luxueux s'entassent comme si l'ont avait voulu en mettre le maximum dans cette pièce sans penser à la façon dont on allait les agencer.
Sa maison respirait le faste, le luxe, la dépense. Je le savais riche, mais à chaque fois que je me rendais chez lui je me sentais mal à l'aise. Pourquoi quelqu'un comme lui avait choisis une pauvre soldates de Bonta telle que moi ? Je lui en avais déjà parlé un soir et, me souriant de la même façon qu'on le fait à une enfant posant une question idiote, il m'avait embrassé le front avant de me chuchoter des paroles rassurante. Ses bras forts autour de moi, ses lèvres contre les miennes je ne pouvais qu'oublier mes doutes et mes craintes.
Continuant à marcher, il me mène avec lenteur jusqu'à son laboratoire situé dans la cave. Nous descendons les escaliers et prise d'un nouveau fou rire à l'écoute de ses paroles je manque de trébucher. Aussitôt il se retourne et vient me soutenir, la mine inquiète. Lui adressant un sourire, je l'assure que je n'ai rien et nous continuons jusqu'en bas.
Ses attentions au quotidien, sa sollicitude permanente et son besoin de me savoir heureuse … Tant de petites choses faisant de lui la personne parfaite à mes yeux. Jamais je n'avais été aussi heureuse.
En lui jetant un regard interrogateur, je demande ce qu'il désire me montrer. Dans le cachot obscur je peux discerner avec difficultés des étagères emplies de livres poussiéreux, sa collection comme il aime l'appeler. Du mur part une chaîne aux maillons lourds se finissant par un collier. Je savais qu'il avait un chienchien, mais je ne pensais pas que celui-ci était parfois attaché ici.
Sur les tables des fioles sont éparpillées, la plupart renversées à côté d'instruments tranchants. Il est médecin, sa renommée s'est étendue depuis bien longtemps dans toute la ville tant ses soins sont efficaces. Fervent disciple d'Eniripsa il manie les mots aussi bien que ses instruments.
Passant sa main dans sa sombre chevelure brune, il se penche devant un placard, semble chercher quelque chose dedans puis se redresse, tenant une bouteille emplie d'un liquide ambré. Je souris en m'approchant et l'enlace d'une main tandis que l'autre se pose sur le récipient. Je laisse lentement mes tatouages sanguins se glisser entre le goulot et le bouchon, faisant sauter ce dernier. Il prend de longues gorgée de l'alcool avant de me le tendre, m'invitant à faire de même. Je me sers pendant qu'il se presse de plus belle contre moi, me complimentant d'un ton joueur sur ma beauté.
Toujours la bonne parole, toujours la bonne remarque. Si son physique ne suffisait pas, ses mots m'auraient à eux seul rendues dépendante. Chacune des phrases sortant de ses lèvres est parfaite, sa personnalité m’envoûte, je ne peux plus me passer de lui.
[…]
Cela fait un mois que nous sommes ensemble. J'ai emménagé chez lui en quittant mon poste à l'armé. Ce n'est pas le salaire de misère que j'y gagnais ou les remarques sexistes que j'affrontais au quotidien qui allaient me manquer. D'autant plus que ses revenus suffisent amplement à couvrir nos besoins, je me sens tout de même coupable, j'ai l'impression de ne pas le mériter. J'ai vendu mon petit studio, pour placer l'argent obtenue sur son compte en banque. J'ai le sentiment de moins lui être redevable.
Tout ce qui m'arrive est décidément trop beau pour être vrai. Et pourtant ça l'est. Chaque jour je l'aime plus, chaque jour je me rend compte de la chance que j'ai de l'avoir rencontré. De fille d'ouvrier vivant des les bas-quartiers, je suis devenue une jeune femme aisée. Ho, Déesse … Un mois c'est court, mais je pense déjà au mariage. Passer ma vie entière à ses côtés, vivre auprès de lui toute mon existence … Ces perspectives d'avenir me font frissonner.
[…]
Une larme coule que ma joue. Venant doucement l'essuyer, il caresse mes pommettes. Nous sommes tout les deux allongés dans le lit, et lui tente de me consoler. Laissant sa main glisser dans mes longues mèches, il m'explique que ce n'était pas grave, qu'il était désolé et que je pourrais l'oublier.
Je viens de parler à mon père, sa réaction a été aussi surprenante que blessante quand il a apprit avec qui j'étais en couple. Il a été clair, c'était ma famille ou lui. Si je continuais à le fréquenter j'allais attirer des ennuis à tous. C'n'était pas juste sa réaction en fait. C'était la réaction de tous. Sans lui laisser la moindre chance ils le rejetaient, ne voulant ni le rencontrer, ni entretenir un quelconque lien avec lui.
Déglutissant je lui répond que ma vie c'était lui. Qu'il était ma raison d'être. Qu'être loin de lui ne serait pas une épreuve mais une torture. Il rit doucement et, souriant tristement, je passe mes mains autour de ses épaules, posant ma tête contre son torse chaud. Sa présence suffit à me réconforter, bercée par sa voix douce me murmurant des promesses d'un avenir radieux, je fini par m'endormir.
II. Dérapage.
Tout est sombre autour de moi, je ne comprends pas . Je ne sais pas depuis combien de temps je cris en vain, espérant que l'on vienne me sortir de là, les heures se sont écoulées sans que l'on vienne m'aider… Que se passe t-il ? Je suis au laboratoire, autour de mon cou est attachée la chaine censée servir pour le chienchien. Mes poignets, tout comme mes chevilles, sont liées entre eux par une épaisse corde, serrée à m'en couper la circulation. Je me suis éveillée ici, dans le noir, incapable de me souvenir de la moindre partie de ma soirée. Je lâche un long soupir, tentant de me concentrer, mais mon esprit est comme embrumé. Mes tatouages sanguins, se cantonnent à mes épaules, semblant refuser de quitter mon corps. Je suis attachée comme un animal et incapable de me défendre.
Où est-il, où est-il, où est-il … Je hurle son nom avant de m'affaler contre le sol en sanglotant.
[…]
Plus d'une semaine … Je crois … Je ne sais pas, je ne sais plus. Déesse, sauve moi, j'n'en peux plus ... Cela fait environ sept jours que je croupis au laboratoire, aucune présence humaine, aucun bruit. Pourtant à chacun de mes réveils je trouve de la nourriture et de l'eau devant moi, et mes liens ont été tranchés. J'ai déjà tenté de feindre le sommeil, mais alors personne ne vient.
Une couverture a été déposée sur mes épaules la nuit dernière, cela ne m’empêche pas de grelotter en permanence. Entre deux pieds de table je peux voir une araknée tracer sa toile avec minutie. Travail qu'elle répète chaque jour avec la même ferveur. De son abdomen sort une toile brillante qu'elle assemble pour former un piège redoutable. Un piège mortel.
C'est étrange, chaque jours … Enfin ce que j'appelle jour, j'ai l'impression qu'un maillon de la chaine est enlevé. Je vais compter, je suis sûre qu'ils disparaissent.
[…]
Encore un maillon en moins … En effet, ils partent bel et bien. A chaque fois que je me réveille un des morceaux de métal manque à l'appel. Il n'en reste presque plus, mon dos est quasiment collé au mur et, désormais, on pose la nourriture sur mes cuisses.
Soudain un bruit me fit tressaillir, je redresse vivement la tête. Devant moi la porte de la cave s'entrouvre doucement, une silhouette se glisse dans la salle. Sa longue cape recouvre son corps, tandis qu'une capuche noire dissimule à la perfection son visage. Il s'avance vers moi, d'une démarche sûre, il n'est pas bien musclé et est assez petit, quand il se tourne j'aperçois deux bosses dans son dos à la hauteur de ses omoplates. Ses bottes claquent sèchement contre le sol. Il arrive finalement à mon niveau et enlève sa capuche, son visage entièrement recouvert par un masque d'un blanc éclatant. Restant un instant interdite, je me m'arc-boute ensuite, lui murmurant de m'aider de ma voix rendue rauque d'avoir trop crié. Je le sens sourire derrière son masque, il pose sa main couverte d'un gant en cuir sur ma joue, la caressant avec douceur. Son index trace lentement une ligne, courant de mes pommettes à ma gorge avant de venir se glisser dans mon décolleté.
[…]
Mes hurlements retentissent dans la pièces, plaintes dénuées de sens. Je ne suis plus attachée par la chaine, mais plaquée sur l'une des tables, sur moi l'homme qui s'avère être lui aussi un disciple d'Eniripsa. Je suis épuisée, incapable de lui résister. Mais de ma gorge les cris ne cessent de sortir, inarticulés, des messages de douleur et de haine.
[…]
Il est parti, me laissant seule sur la table. Le claquement sec du verrou a résonné fort dans la salle, rajoutant une note à mon désespoir. Je me recroqueville, des sanglots lourds me parcourent, sans que je n'arrive à les contrôler. Ho Mère des Douleur, sauves-moi je t'en pries, sauves-moi …
[…]
Encore un autre, même cape, même masque, même religion. Je suis toujours prostrée sur la table incapable du moindre mouvement. Il se glisse jusqu'à moi avant d'enlever rapidement le masque couvrant son visage, se dévoilant fébrilement. Je murmure son nom, c'est lui, celui que j'aime, celui en qui j'ai confiance, celui qui vient me sauver. Il pose sa main sur mon épaule tandis que derrière lui, des silhouettes se faufilent jusqu'à nous. Ils échangent un rapide regard avant qu'il ne se penche sur moi, murmurant des paroles rassurantes comme autrefois. Il était désolé, tellement désolé, les autres avaient enfreint les règles, personne ne devait m'approcher, ils avaient été puni. Pendant qu'il parlait, les autres hommes au nombre de quatre s'étaient mis à chaque coin de la table, des cordes à la main.
M'adressant un dernier sourire encourageant, il se tourne vers eux en hochant la tête. Aussitôt, chacun attrape l'un de mes membres, enroulant la corde autour pour l'accrocher fermement aux pieds de la table. Je tente de me débattre, mais l'étreinte est trop forte. Je cris son nom, apeurée. Il vient faire le tour de la table pour me caresser le front avec bienveillance. Tout allait bien se passer. Ce que je faisais je ne le faisais pas pour eux mais pour la science.
Je le dévisageais, les yeux écarquillés par la terreur. Où était passé l'homme que j'aimais, où était passé l'homme qui m'avait promit qu'il ne laisserais jamais rien m'arriver ? Sur son visage, un sourire réconfortant, machinal, artificiel, sonnant tellement faux. Je pouvais lire sur ses traits l'excitation d'un enfant ayant enfin un nouveau jouet et qui attendait de pouvoir s'en servir.
[…]
Il n'avait fait que jouer avec moi tout ce temps. Il y avait une partie en lui que je n'avais jamais connue, je me rendais à présent compte que cet amour que je ressentais. Cette passion dévorante qui m'avait brulée de l'intérieur, jamais il ne l'avais partagée. Tout ses mots, toutes ses paroles n'avaient jamais été que des leurres destinés à m'isoler pour finalement m'attirer ici.
Je suis attachée, sans la moindre défense, les autres sont partis et seul lui demeure ici. Il est de dos, je n'arrive pas à discerner ce qu'il fait. De ses lèvres s'échappe un filet de voix chantonnant dans la langue de la Soigneuse. Chaque syllabes sortant de ses lèvres était comme une lame chauffée à blanc que l'on enfonçait dans ma raison. Il se retourne enfin en souriant, il tient dans ses mains une longue lame chirurgicale. Continuant de chanter il s'approche avant de remuer légèrement le bâillon sur mes lèvres, m'expliquant joyeusement que mes cris lui feraient très plaisir, mais l’empêcheraient de se concentrer. Je me cambre violemment, tentant de défaire les liens en le voyant glisser la lame sur ma gorge, il secoue lentement la tête, comme si je le décevais et pose sa main sur mon front avant de lâcher d'une voix devenue grave quelques mots en langage Eniripsa. Aussitôt, je me crispe avant de détendre tout mes muscles, n'arrivant plus à en bouger le moindre. Il reprend doucement la comptine et laisse danser sa lame sur ma peau. C'est pour la science, c'est pour la science …
[…]
Il m'a dit que cela fait un mois que je suis ici. La douleur commence a prendre le dessus, je sens que je perd la raison. Du matin au soir il est là. Seul ou avec les quatre autres cachés par leurs masques. Je dois m'enfuir avant de devenir folle je dois sortir de là …
[…]
Trois mois, j'n'en peux plus, j'ai peur. Miséricorde, viens moi en aide, je t'en supplies, viens, j'ai besoin de ta force, de ton soutiens, viiiiiieeeeeeeens !
[…]
Sept mois. Je ne cris plus, je suis une bonne fille. Plus besoin de baillons, je suis une bonne fille. Il m'a murmuré des mots méchants, blessants, mauvais quand j'ai essayé de m'échapper. Je suis désolée, désolée, désolée, je ne recommencerais plus, plus jamais, promis. Mais ne me parles plus comme ça hein ? Tu promets ? Ho j'ai mal, mais je ne dois pas faire de bruit, ça l'agace, ça l'agace, ho que oui je l'agace. Maintenant il ne supporte plus quand je le déconcentre. Plus de bruit donc. Chuuuuuut.
[…]
Dix mois. Il détache les sangles me retenant. Je lui jette un regard aussi terrifié qu'étonné. O-on sort ? Ouiiiiiiiii, je sors, mais seule. Il me laisse partir ! Je me relève avant de poser mes jambes au sol, tentant de m'élancer pour m'échapper. Celles-ci se dérobent sous moi, il agrippe fermement par les hanches, avant de me redresser pour me mener en haut. Hoooo, toute ces lumières ! Méchantes lumières, méchante, elles m'éblouissent. Je pousse un petit cris, me couvrant les yeux de mes mains en me pliant en deux. Il en profite pour m’asséner un coup sec à la nuque.
[…]
Je me réveille avec difficultés dans une pièce inconnue. Aussitôt sur le qui-vive je jette des regards affolés autour de moi. Où ils sont ?! Au pied du lit un piège à mulou traîne. Une nouvelle salle de tortuuuuuure ! Me précipitant dehors, je claque la porte derrière moi. Où je suis, où je suis, où je suis ?! La ville m'est inconnue. Je ne comprend pas ce que je fais ici. Ils sont forcement là, forcement. Je le sais, je le sais. Sur moi, mes vieux habits m’ont été rendus. Je lâche un couinement effrayé quand un badaud vient passer près de moi, m'attirant un regard chargé incompréhensions de la part des passants. Restant sur la route, je cherche à m'éloigner de cet endroit grouillant de gens. Je cours, je cours, mes muscles peinent à répondre. Une petite fille passe derrière moi et commence à me suivre, lâchant des cris de joie, amusé. Des ailes transparentes dans son dos. Je lui jette un regard terrifié avant de courir de plus belle, vers la première demeure devant moi. Le temps d'y entrer et de claquer la porte, j'entends la mère réprimander son enfant. Je me plaque contre le panneau en frêne et jette un regard vif sur la salle. Des étranges personnes munies d'ailes de bois sont assises derrière un comptoir …
[…]
Ho Déesse, je ne sais plus quoi faire … Aide moiiiii je t'eeeeen priiiie ! Je veux oublier, oublier, ne plus me souvenir de cette douleur. Ne plus me souvenir de cette souffrance. Ne plus me souvenir de rien, rien, de plus rien du tout. Accorde moi ta miséricorde, accorde moi ta grâce je t'en prie. Sauves-moi. Rend moi la raison. Donne moi une vie, donne moi ma chance de tout refaire. Je serais ta créature la plus dévouée, la plus fidèle de toute. Mais je t'en supplie accorde moi l'oublie.
[…]
Je pose la lame d'une de mes dagues contre mon avant-bras, l'entaillant largement. Souffrance, offrande, espoirs. Martyr, entend ma prière, reçois ma douleur. Offre moi ma vengeance.
III. Changements.
Oublie … Oublie d'El'Nirle. Ces deux mots se répétant dans mon esprit je venais de les coucher sur le papier. Devant mes yeux, tracées de mon écriture maladroite les lettres s'entrelaçaient pour former enfin ce qui me me tourmentait.
Oublie d'El'Nirle. Rare vestige de mon passés flou dont quelques courtes brides revenaient me hanter sans prévenir depuis le début de la mâtiné. C'était donc mon nom ? C'était donc ainsi que l'on m'appelait auparavant ? Mon instinct me soufflait que oui, mais qu'en savais-je au juste ? Cela pouvait avoir une autre signification, Peut-être était-ce le miens, peut-être que non… Faute de réponses claire j'ai choisi la première solution.
Mère des Douleurs est-ce toi qui m'envoie cette souffrance lancinante qui me perce l'esprit depuis que je me suis éveillée dans cette chambre inconnue d'une taverne tout aussi inconnue il y a deux jours? Mes pensées se troublent, j'ai du mal à me concentrer. A chaque heure s'écoulant cette impression de vide devient plus présente. Je ne comprend pas. Les mots s'embrouillent dans mon esprit, des murmures commencent a se glisser au creux de mon oreille, soufflant des paroles dans un langage brut. Barbare. La voix est rauque, son intonation fascinante. Que dit-elle ? Que veut-elle ? Déesse, la folie est elle en train de s'installer ? Déesse je t'en pries, répond …
La douleur revient, toujours plus vive, toujours plus forte. J'n'en peux plus.
Je suis allée me coucher dans l'espoir qu'à mon réveil la douleur soit partie accompagnée des chuchotement. Raté. Ils reviennent de plus belle.
On toque à la porte. Je dois répondre ? Oui, il vaut mieux le faire. Je me relève lentement de ma chaise, m'avançant vers la poignée. A ma droite un long miroir de pied reflète ma silhouette. Celle d'une femme d'environ trente ans à la peau sombre. Une musculature fine, mais ferme. Des estafilades à moitiés cicatrisées coulent sur toute ma peau, ballet de lignes sanglantes dont l'origine m'est totalement inconnue. Mes long cheveux dont le rouge flamboyant est mis en valeur par un corset d'un blanc pur, cascadent jusqu'à mes hanches. Ces vêtements ne sont pas à moi, je les ai trouvé au pied de mon lit hier matin. Le fin tissu cache en partie mon corps dont le haut est recouvert de tatouages religieux. Ceux-ci pulsent au rythme de mon cœur, semblant doués d'une vie propre.
J'ai la main sur la clenche, les coups à la porte commencent à se faire insistants et une voix masculine vient s'élever.
– Bon vous ouvrez oui ?!
Poussant un soupir d'agacement, j’appuie sur la poignée et dévisage le petit homme se trouvant devant moi. Il pose ses mains sur ses hanches, faisant tinter les fioles pendues à sa ceinture.
Ces oreilles pointues, les ailes dans le dos, des fioles, la petite taille … Disciple d'Eniripsa.
Au fond de moi, les voix s’insinuent de plus belle, leur message se faisant haineux. Leur sens devenait peu à peu plus clair. Du sang, il leur fallait du sang. Pas n'importe lequel, celui de cet homme devant moi. Ce disciple de la Soigneuse.
Le petit être en question me regardait d'un air las, haussant un sourcil en me voyant si peu réactive.
– Bonjour peut-être ?
J'esquisse un sourire mauvais, mes yeux laiteux le parcourant de bas en haut. Je ne sais pas pourquoi, mais la moindre de ses paroles, le moindre son franchissant sa bouche éveille en moi des pulsions violentes. J'entrouvre mes lèvres pour prendre la parole, laissant les voix s'exprimer à ma place.
- Idril telemñaitë le’ssynien, ancalimäe !
L'homme se recule d'un pas, sur son visage la perplexité est lentement remplacée par de la méfiance. Souriant de plus belle, je m'avance en même temps que lui, jusqu'à venir poser mes mains sur ses épaules. Les tatouages de sang sur mes mains quittent lentement ma peau pour venir glisser sur celle du disciple d'Eniripsa, s'enroulant autour de sa gorge. Je sens la peur s'emparer de lui, il tente de se dégager.
[…]
Ma respiration est haletante, à mes pieds un cadavre. Les voix ont pris toute la place, désormais je les comprends …
Mère adorée, mère adorée, je serais justice, je serais ta lance, je serais ton glaive car les péchés des indignes doivent être noyés dans le sang et la peur.